On ne présente plus Jean ANGLADE. Après Vialatte et Pourrat, il est
pour nos contemporains celui qui incarne avec le plus de ferveur et de
générosité pour sa terre d’origine et ses habitants l’Auteur auvergnat.
Jean Anglade a cent ans, aujourd’hui. Et toute une œuvre qu’il a
bâtie en deux temps. Ce que beaucoup ont découvert avec la réédition
récente de ses romans première manière. Ceux de sa « période bleue » qui
s’achève en 1969. Année où il publie deux titres : Le Point de suspension chez Gallimard et Une pomme oubliée chez Julliard.
Les deux très différents. D’un côté, un jeune Irlandais
immigré aux États-Unis part combattre au Vietnam. Quand son avion est
abattu par l’ennemi, il saute en parachute. Le roman dure le temps de la
descente et de la remémoration. De l’autre, une vieille paysanne seule
en Livradois. Le premier s’est vendu à quelques centaines d’exemplaires,
le second a connu un immense succès.
Leçon bien comprise. Jean Anglade a tourné la page, changé de
ton, d’ambition. Il était littéraire plutôt exigeant, styliste
audacieux ; il se fait conteur. Il écrivait loin de l’Auvergne, elle
devient le cadre de tous ses livres. Il en dira les gens, les métiers,
les traditions. Mais rejettera l’étiquette de régionaliste. « Ma planète
c’est l’Homme, dit-il. L’Homme avec ses bassesses, ses grandeurs. »
Son goût pour la simplicité dans les rapports humains fait parfois
oublier qu’il est aussi l’auteur, en dehors d’une quantité de romans
qu’on peut sans exagérer qualifier d’incalculable, d’une traduction du
Prince de Machiavel et du Décaméron de Boccace, ainsi que de biographies
de Pascal, Hervé Bazin ou de Sidoine Apollinaire.